Le philosophe Pascal Bruckner écrivait dans La mélancolique démocratie en 1992 (il y a 19 ans), «aujourd'hui, ce sont les gouvernements qui draguent les citoyens, les supplient de faire leur devoir civique.»
Élections désertées, syndicats en chute libre, citoyens aux abonnés absents, partis politiques en pleine décomposition. Bruckner a souligné que «le système parlementaire est en train de mourir de sa bonne santé.»
Vingt ans plus tard, est-ce encore le cas? La situation s'est-elle détériorée ou y a-t-il eu des améliorations perceptibles?
Les médias sociaux changent-ils quelque chose aux plutôt mous et paresseux désenchantés que nous sommes devenus?
«Chacun devient un déserteur de la chose publique, un exilé de l'intérieur», a indiqué Bruckner. Les pays développés en sont arrivés à une dépolitisation dont aucun régime autoritaire n'oserait rêver. Le despotisme fait de la résignation une vertu, décourageant les citoyens à ne rien entreprendre. En Occident, nous tenons à ne rien entreprendre par des moyens contraires. Le bien-être et un esprit d'individualisme farouche nous ont foudroyés. Tout se passe comme si nos sociétés avaient acquis des droits que pour ne pas en user.
Alors qu'est-ce que la société? Bruckner la définissait ainsi: «La manière dont les citoyens sont séparés à l'intérieur d'un même cadre et se dérobent de la même façon à la participation au bien commun.»
Cela faisait quelque temps que je n'avais pas relu cet essai de Bruckner. La notion de «séparation» me saute aujourd'hui aux yeux.
Car de nos jours, on parle sans arrêt de «connexion». Le monde entier est devenu connecté. Cela n'existait pas il y a vingt ans... Nous abordons aujourd’hui une nouvelle ère dans l’échange des informations entre les hommes, l’ère du «monde connecté». Un monde où tout se situe en deux secondes d'intervalle, le temps d'un clic de souris. Un monde qui fait fi des distances et des technologies. Un monde d’opportunités.
«Les progrès en matière de connectivité et de mobilité sont en passe de bouleverser tout ce que nous connaissons», explique Paul Gustafson, directeur du Leading Edge Forum, le centre de veille technologique de CSC. «La technologie a évolué à un point tel que ce n’est plus véritablement de technologie dont il est question, mais d’imagination et de réorganisation pour s’adapter à une nouvelle réalité.»
D'imagination...
Les technologies et les médias sociaux, en plus de connecter la planète, ont rendu possible que se répande la philosophie du Gouvernement ouvert.
Cependant, malgré l'implantation de quelques pays à Gouvernement ouvert, je considère que l'inertie et l'indifférence sévit encore en Occident. Le changement s'avère à ce jour partiel. Une collaboration entre le gouvernement et les citoyens s'instaure peu à peu. La clé du succès serait-elle l'«imagination»?
On parle beaucoup de créativité dans un contexte de Gouvernement ouvert.
Quant à moi, j'ai souligné l'importance de développer une meilleure compréhension de l'effet de la conscience collective.
Ces notions - imagination, créativité, conscience collective - se rejoignent. Il s'agit d'une seule et même chose.
En ce moment même, ailleurs dans le monde, des citoyens se réveillent et se prennent en main.
Deux millions de manifestants Égyptiens marchent aujourd'hui dans les rues du Caire et un million à Alexandrie. Inspirés par la révolte tunisienne, les Égyptiens contestent à leur tour le régime de Hosni Moubarak, au pouvoir depuis 30 années.
De nombreuses autres populations emboîteront le pas.
Quel effet cela aura-t-il sur la dépolitisation des pays développés? Cela contribuera-t-il à transmuer le credo paresseux des désenchantés? Quel effet cela aura-t-il sur l'imagination, la créativité, et la conscience collective?
Blogue de Lyne Robichaud
01 février 2011
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