Peter M. SandmanDavid NabarroJ’ai deux coups de cœurs à partager avec vous.
Mais tout d’abord, faisons un petit tour d’horizon des derniers développements (et des non-développements).
Ce matin, je me disais que la situation n'avait guère progressé, d'un point de vue POLITIQUE, depuis le 4 mai dernier, date où j'ai rédigé le billet «
OMS, ONU, accordez vos violons».
Nous sommes toujours en phase 5.
Aucune décision n'a encore été prise dans les plus hautes sphères de la gestion de pandémie, et personne n'ose encore appeler les choses par leur nom. Alors que le virus de la grippe A (H1N1) se propage dans le monde entier, il ne fait guère de doute que nous sommes déjà dans les premiers stades d'une pandémie généralisée. Néanmoins, nous assistons à un concert de résistance considérable à appeler ce qui se passe une «pandémie».
«
Les arguments sur l'état de la pandémie de grippe porcine sont une distraction de la lutte contre l'épidémie»,
a averti Declan Butler le 21 mai dernier dans Nature.
Comme l'
a répété si souvent Henry Niman, le virus de la grippe porcine ne lit pas les communiqués de presse de l'OMS, et ce virus poursuit inexorablement sa conquête de l'espèce humaine, voyageant d'une contrée à une autre. Combien y a-t-il de cas réels? Je suppose que cela doit tendre désormais vers le million de personnes infectées. Le
magazine New Scientist a indiqué que des calculs basés sur les débuts du virus ont prédit qu'il y aura un milliard de gens infectés d'ici le mois de juillet 2009. «
Les experts de la santé ont expliqué à New Scientist, que sur la base du taux d'augmentation exponentielle calculé peu de temps après que l'OMS ait commencé à compter les cas, le H1N1 pouvait infecter plus d'un milliard de personnes d'ici juillet 2009.»
Cette semaine, le numéro 2 de l'Organisation mondiale de la santé, le Dr
Keiji Fukuda, a déclaré que les données ne signifiaient plus grand chose: «
Les chiffres eux-mêmes sont devenus de moins en moins pertinents (...) Ils vont de moins en moins refléter ce qui se passe réellement.»
Pendant que l'OMS et l'ONU hésitent avant d’augmenter l’alerte pandémique au dernier cran, nous avons l’impression que les nations se traînent les pieds pour déclarer le moins de cas possibles.
Consulter la liste des cas confirmés par pays (
bulletin no.37 de l'OMS) fait sourciller. Au 23 mai 2009, 28 pays (sur 42) ont confirmé moins de 10 cas de grippe porcine chacun.
Le directeur du CIDRAP,
Michael Osterholm, a mentionné cette semaine que quelque chose clochait avec les chiffres européens. Il a dit que les chiffres officiels de la Grande-Bretagne ne faisaient pas sens, et que «
si les autorités ne cachent pas de cas, elles ne font pas tellement d’efforts pour trouver le virus. Les chiffres de la Grande-Bretagne ne racontent pas vraiment toute l’histoire. S’il n’y a vraiment que quelques cas en Europe, nous devrions tous y envoyer des équipes pour savoir ce qui s’y passe», a-t-il dit.
Donc, les États-Unis d'Amérique semblent être le seul endroit sur la planète où il survient de très nombreux cas de grippe A (H1N1): 6552 selon le dernier décompte. Et dans le pays d'à coté - le Canada - il n'y en a que 719 (ce nombre n'a pas été mis à jour, le
dernier total affiché par l'Agence canadienne de la santé publique étant de 805 cas au 22 mai 2009).
Même que le Dr David Butler-Jones, administrateur en chef de la santé publique du Canada, nous
a affirmé dernièrement que le pire du foyer d'infection était derrière nous. «
Il semble à ce point que nous ayons franchi le pire au Canada pour cette saison», a-t-il déclaré.
Ce qui est en contradiction directe avec
une déclaration de la directrice générale de l'Organisation mondiale de la santé, Margaret Chan: «
Nous nous attendons à ce que le virus continue de se propager à de nouveaux pays, de même que dans les pays déjà touchés.»
Le Canada est le troisième pays le plus touché au monde par la grippe porcine, et donc si nous nous fions aux dires de Margaret Chan, les cas vont continuer d’augmenter, et non pas aller en décroissant, comme voudrait que nous le croyions le Dr David Butler-Jones.
Voici mes deux coups de cœur.
Le premier consiste en un article publié dans Nature par le communicateur de risque Peter M. Sandman, intitulé «
Pandémie: une bonne hygiène ne suffit pas». Le plus grand défaut du CDC [et de tous les gouvernements] est de ne pas en faire suffisamment pour aider le public à visualiser ce à quoi une pandémie grave pourrait ressembler, a dit Peter M. Sandman. Lisez l’article
au complet, il est très instructif et révélateur.
Mon second coup de cœur est arrivé par surprise, hier en fin d’après-midi, quand j’ai ouvert mon compte de Facebook, et que j’ai vu que David Nabarro, coordonnateur senior de l’action des Nations Unies contre la grippe aviaire et humaine, avait posé un défi: «
Défi: Pouvons-nous demeurer vigilants, tout en nous assurant que la solidarité mondiale et les partenariats se maintiendront au sommet des défis de la préparation à une pandémie au cours des trois prochains mois?»
David Nabarro s’est soudainement mis à interagir avec des membres de la sphère du Flublogia ces dernières semaines, alors qu’il était demeuré assez réservé au cours des derniers mois. Il a noué de nouvelles amitiés, et a même écrit sur des babillards. Par exemple, j’ai vu passer des échanges entre lui et Greg Dworking (bloguant sous le pseudonyme de DemFromCT). Il est également devenu ami avec Craig Vanderwagen, du HHS américain.
Solidarité mondiale? Comment est-il possible de faire encore totalement confiance aux autorités?
L’expression «solidarité mondiale» s’applique-t-elle aux citoyens? Où sont donc passés les préparatifs sociaux mentionnés dans le
4e Rapport intérimaire de l’ONU sur la gestion de la grippe aviaire? J’imagine que dans les circonstances, ils devraient également s’appliquer à la grippe A (H1N1). J’en ai peut-être manqué des bouts, mais j’ai l’impression que dans l’opéra qu’on nous joue, l’acte qui devait porter sur les préparatifs sociaux a été complètement supprimé du spectacle, à part les recommandations sur le lavage des mains.
«
Fondamentalement, les fonctionnaires doivent se demander s’ils voient la population en tant que victimes potentielles à être protégées et rassurées, tout comme de jeunes enfants, ou des combattants d'une pandémie – des adultes - qui peuvent jouer un rôle actif dans la crise qui pourrait être à venir. La différence de tonalité pourrait sauver des vies.»,
a indiqué Peter M. Sandman.