Blogue de Lyne Robichaud

08 février 2009

Le bon «timing», qui évitera de sombrer dans un «pandémisme de façade»?

Nous sommes dans un contexte économique particulier, en pleine crise économique mondiale. On commence à lire le mot «récession» associé au Québec dans les journaux.

Cela fait un bout de temps que nous entendons parler aussi de changements profonds s’opérant au sein du milieu journalistique, avec la montée de l’utilisation d’Internet. L’an dernier, l’ex-ministre de la Santé fédéral américain, Mike Leavitt, avait participé à une conférence portant sur la blogosphère de la santé, et les conférenciers invité ont prononcé des discours visionnaires. Voir mes billets à ce sujet: Partie 1; Partie 2.

La crise économique a précipité la chute du modèle d’affaires des journaux, et cette semaine, il y a eu des réflexions de la part du blogeur Revere (d’Effect Measure) à propos de qui allait assurer la relève de la cueillette et de l’analyse de l’information dans le domaine spécialisé de l’influenza (voir ces billets de Revere: celui-ci et celui-ci). Nous avons eu droit à des révélations surprenantes, et avons pu nous réjouir que deux de nos collègues, les blogueurs américains Revere et DemFromCT ont été validés comme étant des sources «bonnes et fiables» [de contenu] par nul autre que le Dr Michael Osterholm, directeur du Center for Infectious Disease Research and Policy (CIDRAP), le top du top en matière d’autorité dans le domaine de l’influenza.

Cela est survenu le 5 février dernier. À noter à vos calendriers!

Le Dr Osterholm a annoncé qu’il validerait d’autres gens au cours de ses prochains éditoriaux dans CIDRAP Business Source.

Cette «validation» de membres actifs de la sphère du Flublogia survient deux semaines après la cérémonie d’inauguration du nouveau président des États-Unis, Barack Obama. À peine en poste, il a signé un Memorandum annonçant ses couleurs, en priant son administration de construire les programmes et les projets sur trois valeurs: transparence, participation et collaboration. L’administration Obama s’est lancée dans un virage 2.0 et nous avons pu observer la mise en place d’outils et d’éléments qui contribueront à façonner un gouvernement 2.0. Voir mon billet à ce sujet.

Une certaine forme de «validation» d’autres membres de la sphère du Flublogia s’observe également via les échanges avec des agences gouvernementales effectués sur plusieurs plate-formes 2.0. Et ce phénomène risque de s’accentuer au cours des prochaines semaines et des prochains mois.

Je me demande s’il y a une relation entre la «validation» du Dr Michael Osterholm et le vent de changement apporté par Barack Obama. Cette «validation» aurait-elle pu avoir lieu AVANT le 20 janvier 2009? D’après les commentaires de Michael Osterholm, il semble davantage préoccupé par l’aspect économique du modèle d’affaires du milieu de la presse, ainsi que par les dommages collatéraux associés à la chute des ventes des journaux. Ces commentaires du Dr Michael Osterholm ont été cités par Revere, mais je pense qu'il est opportun de les répéter en ces pages:
Il ne fait aucun doute que l'effondrement du chiffre d'affaires des journaux s'avère dévastateur à la fois pour leurs actionnaires ainsi que leurs salariés. [saut de paragraphe] Ce qui me préoccupe le plus, ce sont les dommages collatéraux causés par la chute libre [de vente] des journaux. La fiabilité du renseignement des informations d'actualités dépend présentement des personnes qui recueillent l'information, et de la manière dont elles interprètent les événements et les situations qu'elle rapportent. Les journalistes formés à la vieille école qui ont parcouru d'innombrables miles avec leurs chaussures usées, avec des rédacteurs chevronnés, fournissent véritablement de l'information à valeur ajoutée, qui défient des mesures faciles ou descriptions en termes économiques.

Dans un monde de connectivité mondiale quasi instantanée, je pense que la disparition de l'ancien modèle de services et de compétences journalistiques signifiera pour vous la différence entre avoir des enquêtes professionnelles, contrôlées, et de l'information contrôlée, versus l'opinion de certains bloggeurs comme étant perçue à valeur égale. Dans le monde des affaires, où des informations opportunes sont souvent assimilées à de l'argent, qu'est-ce que vous faites pour compenser la perte du renseignement de la communauté, et même mondiale? (CIDRAP Business Source, 22 janvier 2009)

S'il n'y avait pas eu de crise économique mondiale, si le plan d'affaires des journaux ne s'était pas effondré entre temps, si les salaires de nos plus glorieux journalistes n'étaient pas menacés, aurions-nous pu apprendre à propos de la «validation» de certains de nos collègues blogeurs comme étant des «sources fiables» par des gens comme le Dr Michael Osterholm?

Bien entendu, je me réjouis de cette nouvelle. Mais cela me fait réfléchir sur ce que signifie au juste l'expression «préparatifs pandémiques sociaux». Il y a lieu de se demander ce que les grands planificateurs avaient derrière la tête, lorsqu'ils ont recommandé qu'il y ait désormais des préparatifs multisectoriels sociaux, économiques et politiques.

Nous assistons à un virage 2.0 sans précédent opéré par le gouvernement des États-Unis. Cela aura une influence sur les préparatifs pandémiques sociaux, car dès à présent des outils virtuels sont créés, mis en œuvre et améliorés par de nombreuses agences américaines. Les membres de la sphère du Flublogia se situent au coeur du balbutiement de ces activités virtuelles. Ils en font partie prenante. Ils sont des piliers de rayonnement. Ces expériences 2.0 pourraient servir à d’autres nations, éventuellement.

Mais si Barack Obama n’avait pas été élu, et si nous n’avions pas été plongés dans une crise financière majeure, aurions-nous observé une aussi rapide ascension de la sphère du Flublogia?

J'ai lu un article publié aujourd’hui à propos de «l'environnementalisme de façade» du gouvernement fédéral canadien (et provincial québécois), ce qui signifie que les gouvernements qui se sont succédés depuis 40 ans à Ottawa ont fait semblant de lutter contre la pollution et le réchauffement climatique, d'après un rapport dévoilé cette semaine.

La lecture de cette expression m'a poussée à faire un parallèle avec les préparatifs pandémiques. S'il n'y avait pas eu ce contexte économique particulier, je me demande si nous aurions eu du «pandémisme de façade»? Jusqu'à quel point aurait-on fait semblant de mettre au point des préparatifs sociaux en vue d'une pandémie? Car nous ne pouvons pas prétendre que jusqu'à ce jour, les efforts réels pour inciter à qu'aient lieu des préparatifs pandémiques individuels se soient avérés retentissants. Il faut creuser, et beaucoup, avant de tomber sur des directives. Les flubies connaissent par coeur sur le bout de leur doigts la plupart des mesures mises de l'avant par les nations du monde. Toutefois, celles-ci ne sont pas connues pas le commun des mortels. Tout le monde connaît le prix courant du timbre poste, ou encore le numéro de téléphone à composer en cas d'urgence de santé, mais tout le monde sait-il combien de semaines de réserve d'approvisionnement il est recommandé d'avoir prévu en cas de situation d'urgence/pandémie? Seul un très petit pourcentage de la population est au courant des dernières tendance en matière de gestion de pandémie.

Rien dans les changements que nous observons ces dernières semaines ne garantit que des gouvernements ne continueront pas à faire semblant d'appliquer à l'égard des préparatifs pandémiques une stratégie qui consiste à rassurer l'opinion publique en dérangeant le moins possible les habitudes et les profits des acteurs économiques traditionnels. L'autre billet que j'ai rédigé aujourd'hui porte justement sur ce sujet.

Mais le fait que la sphère du Flublogia gagne de jour en jour en respect et en reconnaissance est un bon indice que des enjambées significatives pourraient un jour avoir lieu dans le domaine des préparatifs sociaux.

Maintenant que des membres de la sphère du Flublogia ont été reconnus comme étant fiables, et que l’implantation du gouvernement 2.0 s’effectue en accéléré aux États-Unis, j’ai confiance qu’un grand tapage social puisse avoir un jour lieu (avant le déclenchement d'une pandémie), qui permettra de sensibiliser des millions de gens à la réelle menace de pandémie. L’époque, le «timing», aideront à mettre sur les rails des préparatifs pandémiques sociaux qui pourraient cette fois-ci s’avérer bien réels, et non pas uniquement de façade.

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