Blogue de Lyne Robichaud

03 juin 2011

L'infaillibilité gouvernementale ne va pas de pair avec un gouvernement ouvert

Jean-Marc Fournier
Le concept d'infaillibilité pontificale me tapait sur les nerfs dès l'âge de 7-8 ans. (Je n'ai jamais compris en quoi ce concept était acceptable.) Il en est de même pour l'infaillibilité gouvernementale, qui ne va pas de pair avec la philosophie de gouvernement ouvert, puisque pour arriver à solutionner des problématiques grâce à la participation et la collaboration des citoyens, il faut d'abord et avant tout qu'un gouvernement soit capable de reconnaître qu'il existe des problématiques. Un gouvernement ne peut faire appel à l'aide des citoyens et transformer des problèmes en défis, s'il y a déni face à des situations ou des problèmes.

Hier, le journaliste politique au Journal de Québec Taïeb Moalla @Moalla, a signé un article intitulé «Hells Angels, 'Pas d'échec de la part du gouvernement'», dans lequel il cite les propos du ministre de la Justice et leader parlementaire du gouvernement du Québec, Jean-Marc Fournier,: «Non. Non. Non, il n’y a pas d’échec de la part du gouvernement.»

@Moalla a d'abord publié les propos du ministre dans un gazouillis, puis l'article est paru quelque temps plus tard. @Normand55 a ajouté ce commentaire au gazouillis: «Pas un échec mais une FAILLITE TOTALE».

Je le répète encore, le déni est une stratégie de défense qui mène à éviter, sinon à nier une réalité. La personne qui pratique le déni conserve le savoir de la réalité tout en lui substituant une perception imaginaire. Cette personne possède alors deux visions incompatibles mais dénuées de tout lien, ce qui permet au moi d'exister sur deux registres différents, avec d’un côté la réalité perçue, et de l’autre côté, la réalité reconnue, contraire à la perception.

Effectuons ensemble un petit exercice mental. Imaginez une situation où surviendrait un déni gouvernemental lors de discussions avec des citoyens sur des plates-formes de médias sociaux. Pensez-vous que les gens vont discuter longtemps, que les échanges seront plaisants, et que la relation qui s'établira, entre le gouvernement et les citoyens, sera positive et constructive? Si les intervenants gouvernementaux existent sur deux registres différents, les citoyens le détecteront intuitivement. Ils remarqueront que les intervenants ne sont pas sincères, authentiques et transparents.

J'ai reçu hier une invitation sur Facebook de Alain Destexhe, un homme politique belge libéral. «Rejoignez-moi sur ma page Facebook le 12 juin de 20h à 23h», propose-t-il.

Effectuons ensemble un second exercice mental. Imaginez que ce soit le ministre de la Justice du gouvernement du Québec, Jean-Marc Fournier, qui lance cette invitation pour le dimanche 5 juin. Êtes-vous en mesure d'anticiper quels seront les commentaires des participants/usagers de Facebook?

Les réponses que formulent présentement les députés, dans les débats à l'Assemblée nationale, différeront-elles de celles que ces députés publieront dans les médias sociaux?

Il y a présentement sur la table un mandat d'analyse du potentiel du Web2.0, piloté par le leader parlementaire adjoint, Henri-François Gautrin.

Étudier et analyser le potentiel du Web 2.0, scruter ce que peuvent accomplir les nouvelles technologies, proposer des avenues par le biais des médias sociaux, c'est passionnant, n'est-ce pas? Il faudrait aussi que les acteurs gouvernementaux s'écoutent parler, observent comment ils se comportent actuellement, afin d'être en mesure de proposer des solutions pour modifier leur approche, et l'adapter au contexte du Web2.0.

Le déni qui se traduirait dans les actes, dans un contexte Web 2.0, ne permettrait pas l'amélioration de la relation entre le gouvernement et les citoyens.

Le déni ne peut coexister dans un contexte de gouvernement ouvert. Dans le déni, tout échec est intolérable: il conduirait à un bouleversement de la façon de vivre. La peur de la déchéance résultant d’une défaite constitue le motif principal de l’évitement. Or, un gouvernement ouvert est en constante transformation, le changement via l'innovation et le recours aux nouvelles technologies est le moteur de cette façon de gérer une administration ou un gouvernement. Les problèmes (évitements, échecs, défaites) sont transmués en réussite.

Admettre ses limites, y faire face concrètement et renoncer par conséquent aux illusions de toute-puissance qui aident à maintenir l'équilibre, voilà le genre d'implications existentielles qui devraient être analysées dans le mandat sur le potentiel du Web 2.0.

La peur de la défaite ou de l'échec peut prendre la forme d’un manque de confiance en soi. C'est pourquoi je le répète encore, pour cheminer vers une transformation vers le Web2.0 (et ultimement, espérons-le, vers un gouvernement ouvert), il est nécessaire d'inclure des plans de formation axés sur l'empowerment individuel, communautaire et organisationnel, et s'assurer que la valorisation soit au cœur des processus.

La personne qui sera nommée «tsar de gouvernement ouvert» ― si jamais un jour le gouvernement du Québec faisait le choix d'effectuer cette transformation ― devra aviser l'ensemble des intervenants du gouvernement, élus et employés gouvernementaux, qu'un changement d'attitude est nécessaire pour faire en sorte que réussisse n'importe quelle initiative en lien avec le Web 2.0 et/ou des plates-formes de données ouvertes et de gouvernement ouvert. Si le Québec n'évolue pas vers un gouvernement ouvert, même en ce qui concerne des initiatives de Web 2.0, ce changement d'attitude serait souhaitable.

Aucun commentaire:

 
TwitterCounter for @Lyne_Robichaud