Paru le mercredi, 27 août 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com
Le Japon est parti sur une lancée de préparatifs de pandémie. Nous avons appris dernièrement que les Japonais vont débuter cet automne un projet d’immunisation des premiers répondants avec un vaccin pré-pandémique, qui sera par la suite administré à toute la population, soit environ 20 millions de personnes.
De notre côté, le Canada a fait savoir qu’il n’achèterait pas de vaccins pré-pandémiques. C’est ce qu’a révélé la journaliste Helen Braswell le 18 mai dernier: «Les autorités canadiennes se sont abstenues [d’acheter le vaccin Prepandrix de GlaxoSmithKline], en disant qu’elles préféraient s’en tenir au présent contrat du Canada qui accorde au pays un accès privilégié à quelque vaccin que ce soit produit à l’usine de GlaxoSmithKline une fois que sera déclenchée une pandémie.»
Le Japon a ensuite annoncé qu’il planifiait doubler sa réserve de Tamiflu. «Le Japon devrait augmenter la réserve de médicaments pour la grippe, afin de couvrir environ 60 millions de personnes, ou la moitié de sa population, pour lutter contre une pandémie possible qui pourrait tuer des millions de personnes, a recommandé un panel du gouvernement.»
Par ailleurs, le Japon a fait don de 500,000 doses de Tamiflu à ses voisins de l’Asie: «Le Japon a accepté de fournir 500,000 doses additionnelles de Tamiflu aux pays de l'Asie du Sud-Est, soulevant des préoccupations additionnelles en ce qui concerne la situation en Indonésie. L'expédition précédente de 500,000 doses de Tamiflu a été stockée à Singapour, qui est adjacent à Sumatra du nord.»
Le Canada a quant à lui publié dernièrement le rapport du Conseil du RPSP et les recommandations sur l’utilisation d’antiviraux à des fins prophylactiques pendant une pandémie d'influenza, Le Conseil du RPSP a nommé un Groupe de travail sur l’utilisation d'antiviraux à des fins prophylactiques (GTAP) afin d’examiner le bien-fondé de l’utilisation d’antiviraux à des fins préventives durant une pandémie d’influenza. La conclusion du GTAP, concernant l’utilisation étendue d’antiviraux à des fins prophylactiques pendant une pandémie, est que «cela n’est pas justifiable pour le moment». Ces arguments sont tous acceptables, surtout en contexte d’une propagation de 100% de la résistance au Tamiflu dans la grippe saisonnière (H1N1) observée dernièrement en Afrique du Sud et en Australie, sauf que pendant que la possibilité des antiviraux est écartée, quoi d’autre est suggéré? Il faudrait chercher à savoir de quelle manière les premiers répondants seront protégés au Canada lors d’une pandémie…
Le Japon a ensuite annoncé qu’il s’associait à deux autres pays, la Chine et la Corée du Sud, pour orchestrer cet automne une simulation de pandémie.
Avez-vous déjà entendu parler d’une simulation de pandémie ou d’un projet de simulation de pandémie au Canada ou au Québec? Nous avons eu droit à de nombreuses répétitions de cliniques d’administration massive de vaccins, mais pas de répétition générale, de simulation où tous les acteurs seraient appelés à se pratiquer à faire face à une pandémie.
Ne perdons pas de vue non plus que nous n’aurons aucun vaccin pré-pandémique au Canada. Et qu’il n’est pas certain non plus que nous voyions la couleur d’un vaccin pandémique avant de très longs mois après le déclenchement d’une pandémie, voire même une année. Les autorités sont persuadées que les vaccins seront disponibles «trois mois après» l’apparition de la souche pandémique, mais elles ont oublié un élément majeur dans leur planification: l’impact d’une pandémie sur les systèmes d’approvisionnement et notre économie juste-à-temps. Cela pourrait influencer sur le temps de livraison d’un vaccin.
Ensuite, le Japon a annoncé qu’il allait multiplier par 10 son budget de planification de pandémie, passant à 60 milliards de yens (soit 534 millions de dollars américains).
À combien s’élève le budget de planification pandémique au Canada, et au Québec? Des augmentations d’enveloppes budgétaires sont-elles prévues?
Aujourd’hui, le 27 août, Michael Coston rapporte que le Japon annonce qu’il prévoit l’achat de 3,600 respirateurs supplémentaires en 2009, soit une dépense de 2 milliards de yens, ou environ 5,000$ par respirateur.
Je ne suis pas en mesure de vous donner des précisions sur la situation canadienne, mais j’ai vu passé des données récentes en ce qui a trait aux projets du gouvernement du Québec. Mais malheureusement, ce n’est pas dans les habitudes du gouvernement de nous informer à ce sujet. La source provient d’une association de professionnels, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, un document daté du 2 au 6 juin 2008 intitulé «Pandémie d’influenza: avancement des travaux».
On peut lire en page 11 de ce document:
«Le ministère effectue actuellement un appel d’offre pour l’achat de respirateurs dans le but d’en arriver à un ratio d’un respirateur pour chaque lit de soins intensifs au Québec.»La quantité de respirateurs qui sont prévus être achetés, bien qu’elle ne soit pas précisée (comme d’habitude…) est plus facile à calculer que les termes associés à la providence divine, auxquels nous (la population) avons habituellement droit. Il est probable que le gouvernement du Québec ne s’adresse pas dans les mêmes termes aux professionnels de la santé qu’il ne le fait pour la population québécoise. Il suffira de savoir cette fois-ci combien de lits de soins intensifs existent actuellement au Québec, et nous pourrons estimer plus ou moins combien de respirateurs sont prévus être achetés.
Admettons que le nombre de respirateurs souhaités est beaucoup plus simple à déterminer que ce qui correspond à une «manne» de vaccins ou encore à des «ententes pour s'assurer d'en avoir toujours en quantité suffisante». Un article du Devoir du 12 juillet dernier citait le vocabulaire de providence divine de la porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux: «Des compagnies pharmaceutiques ont déjà conclu des ententes avec le gouvernement fédéral pour produire une manne de vaccins lorsque la souche pandémique sera connue.»
Un article du Soleil du 11 août dernier citait Pierre Laflamme, coordonnateur du comité du MSSS sur la pandémie, concernant un investissement de 50 millions de dollars supplémentaires en achat d’antibiotiques pour le traitement des infections secondaires en cas de pandémie de grippe aviaire: «On a signé des ententes pour s'assurer d'en avoir toujours en quantité suffisante».
Pour l’investissement de 50 millions de dollars dépensés pour acheter des antibiotiques en prévision de la pandémie de grippe au Québec, si cette nouvelle n’est pas affichée sur le site de Pandémie Québec, cela peut laisser croire à la population que la nouvelle n’est pas entérinée par le gouvernement du Québec. Pour comprendre cette situation, j’ai contacté M. Pierre Laflamme, par téléphone, et dès qu’il a su qui j’étais [administratrice d’un média social], il a raccroché après m’avoir dit qu’il me mettrait en communication avec le Service de presse du MSSS, et depuis, personne ne m’a contactée. Pierre Laflamme a toutefois pris le temps de m’informer que le MSSS n’avait publié aucun communiqué de presse pour annoncer l’investissement, puisque cette nouvelle avait été diffusée sous forme d’entrevue avec le journaliste du Soleil. À mon point de vue, même si le MSSS n’a pas publié de nouvelle officielle à cet effet, cela devrait être mentionné sur leur site, parce que les gens ne le sauront pas, si ce n’est pas mentionné ni par le ministère de la Santé, ni par Pandémie Québec.
Autre question: est-ce que la firme BCP a planifié un «plan de communication» ou établi un plan de match de relations publiques concernant l’annonce du 50 milions d’investissement? À quoi sert la firme BCP et quel travail effectue-t-elle pour le 725,000$ en «planification stratégique» qui lui est versé chaque année?
Retournons aux respirateurs… À propos de l’annonce japonaise d’acquisition de respirateurs, le blogueur américain Michael Coston a indiqué:
«Bien entendu, ce n'est pas tout de posséder les respirateurs. Les patients assistés par respirateur exigent des professionnels hautement qualifiés pour surveiller et ajuster leurs systèmes de soutien à la vie.À ce propos, le document de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec a identifié une problématique majeure. Alors que l’estimation des besoins en nombre d’inhalothérapeutes en temps de pandémie au Québec s’élève à 228 (d’après le document de la FIQ), pour le moment, seulement 10 volontaires se sont proposés pour le maintien des activités pendant la pandémie. La FIQ a indiqué une note dans son document: «218 infirmières ont été rajoutées aux dix inhalothérapeutes pour combler le manque d’effectif chez ces derniers». Mon analyse de la deuxième partie du document suivra prochainement, et je reparlerai alors des inhalothérapeutes. En attendant, vous pouvez lire la première partie de mon analyse du document de la FIQ, ici.
De quelle manière les Japonais planifient de combler ces besoins n'est pas mentionné dans cet article.»
Il serait utile que les autorités canadiennes et québécoises prennent le temps de rédiger un communiqué de presse pour faire le point sur la situation concernant l’avancement des préparatifs pandémiques et fournissent des précisions sur les projets en cours, de même que ceux prévus à moyen terme. Ces informations devraient être affichées dans le site Pandémie Québec, et accessibles en tout temps.
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