Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

Prévoyance et prudence, et comment la sécurité civile est soi-disant davantage que "réagir à un sinistre"

Paru le mercredi, 13 août 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com


Steve West, Stone. Getty Images # 82274413
(j'ai choisi cette photo parce que j'associe l'attitude farouche
des cervidés à la notion de "prudence et de prévoyance")

Une source m'a fait parvenir un document du ministère de la Santé et des Services sociaux du gouvernement du Québec. Il s'agit d'une présentation de M. Pierre Laflamme, directeur général adjoint avec ententes de gestion, Direction générale à la coordination, finance, équipement et ressources informationnelles de Santé et Services sociaux.

Vous trouverez ce document ici.

La présentation débute avec la fameuse pyramide du système de sécurité civile au Québec, où les citoyens se retrouvent en haut du système de responsabilités, alors que le gouvernement est en bas. Le document mentionne la notion de "prudence et de prévoyance" que l'on retrouve à l'article 5 de la Loi sur la sécurité civile, celui-là même qui exige des citoyens qu'ils adoptent une attitude de "prudence et de prévoyance" face aux "sinistres majeurs". Une pandémie fait partie de la liste des "sinistres majeurs" selon cette loi.
5. Toute personne doit faire preuve de prévoyance et de prudence à l'égard des risques de sinistre majeur ou mineur qui sont présents dans son environnement et qui lui sont connus.

2.1 «sinistre majeur»: un événement dû à un phénomène naturel, une défaillance technologique ou un accident découlant ou non de l'intervention humaine, qui cause de graves préjudices aux personnes ou d'importants dommages aux biens et exige de la collectivité affectée des mesures inhabituelles, notamment une inondation, une secousse sismique, un mouvement de sol, une explosion, une émission toxique ou une pandémie.
Ensuite, le document de présentation de M. Pierre Laflamme enchaîne avec de beaux messages à véhiculer, dont:

"La sécurité civile... c'est plus que réagir à un sinistre.
Prévention / préparation / intervention / rétablissemen
t"

Plus loin dans le document, le contrôle des épidémies est présenté en trois volets:
- surveillance
- communication
- vaccination

Et le document conclut en montrant quelques pages du Programme de formation.

Ce que je ne comprends pas, c'est où se situe exactement la prévention et la préparation des citoyens dans les stratégies du gouvernement. En parcourant le document, je n'ai trouvé aucun élément indiquant quoi faire pour développer la prévention et la préparation.

Dans le document de M. Pierre Laflamme, le "contrôle des épidémies" ne parle pas de prévention ni préparation. Les interventions non pharmaceutiques ne sont mentionnées à nulle part. Le document se borne à mentionner la surveillance, la "communication" et la vaccination". Peut-être que les interventions non pharmaceutiques veulent dire "communication"? Cela veut dire quoi au juste, l'expression "communication"?

Le document de Pierre Laflamme n'en dit pas plus long, mais a priori, il me semble qu'il n'y a pas tellement de cohérence entre le début de la présentation, qui porte sur la notion de "prudence et de prévoyance", et les moyens proposés pour le contrôle des épidémies. Cela ne tient pas debout. C'est mon point de vue personnel, et vous ferez ce que vous voudrez avec...

C'est bien beau de parler de "prudence et de prévoyance", mais comment cela s'articule dans le pratico-pratique, il me semble qu'il serait nécessaire de pousser cette avenue d'intervetion proposée par le gouvernement du Québec. L'idée est avancée, mais le raisonnement n'est pas complété, et surtout, il n'y a pas d'actions proposées pour répondre à l'idée de départ. Il y aurait lieu de retourner à la planche de départ, revoir chaque étape de la stratégie, et améliorer les moyens d'actions afin que certains ouvrent la porte à des possibilités de préparatifs individuels.

Comme me l'a déclaré Marc Nolin, le coordonnateur régional des communications en mesures d’urgence de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, en janvier 2008: "Tout le monde est au courant de la pandémie! À chaque semaine, il sort des articles dans les médias locaux au sujet de la grippe aviaire. Les citoyens n’ont qu’à lire le Journal de Montréal."

Assumer que tout le monde est au courant des questions de pandémie (surtout en se fiant aux nouvelles publiées par le Journal de Montréal), alors que nous savons que c'est complètement faux, "oublier" délibérément d'informer les gens, en s'appuyant sur un diagramme de pyramide avec les citoyens comme premiers responsables, et de l'article 5 de la Loi sur la sécurité civile, signifie, à mon humble avis, que le gouvernement met complètement sur le dos des citoyens le soin de se préparer à faire face à une pandémie.

Donc, arrangeons-nous pour nous informer et nous préparer du mieux que nous pourrons, parce que lorsque la pandémie va se pointer, ce sera de NOTRE FAUTE - je peux vous l'affirmer - si nous n'avons pas été suffisamment "prudents et prévoyants". Pendant ce temps, le gouvernement s'assure que les outils développés par des citoyens ne prendront pas trop d'envergure, en refusant la reconnaissance de la sphère du Flublogia (et le site Zonegrippeaviaire).

Prenez bien note qu'il y a plusieurs articles dans la Loi sur la sécurité civile qui disculpent le gouvernement de ses actions: ils ont l'IMMUNITÉ.
"Le gouvernement et ses membres, l'autorité responsable de la sécurité civile et la personne qu'elle a désignée, la municipalité, le délégataire et leurs inspecteurs, le ministre, une personne désignée en vertu de l'article 72, un inspecteur et un enquêteur ne peuvent être poursuivis en justice en raison d'un acte accompli de bonne foi dans l'exercice de leurs fonctions."
J'ai bien hâte de voir ce que "acte accompli de bonne foi" va bien vouloir dire pendant la prochaine pandémie...

Aucun commentaire:

 
TwitterCounter for @Lyne_Robichaud