Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

La notion de crédibilité des médias sociaux va de pair avec une part de négatif

Paru le lundi, 4 août 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com

Michelle Blanc, et Denis Paul van Chestein, dans des commentaires à propos des 10 mythes des médias sociaux, évaluent qu’il s’agit d’une bonne chose que les médias sociaux génèrent quelques critiques négatives, car cela ferait en quelque sorte partie de la vie. En effet, il est normal de ne pas plaire à 100% des gens. Les entreprises qui comprennent cela sont gagnantes, car elles ont l’opportunité de s’améliorer en étant à l’écoute des commentaires. Les critiques leur permettent de développer leurs produits afin qu’ils répondent mieux aux attentes de leurs clientèles. Donc la critique pourrait être un moyen de se dépasser.

Denis Paul van Chestein a indiqué le fait que les «experts en «social network» estiment qu’il faut au minimum 10% de commentaires négatifs ou d’insatisfaits pour que le réseau ait l’air crédible aux yeux des utilisateurs/visiteurs». J’ai remarqué que la notion de crédibilité est associée à un certain aspect négatif. En fait, je m’interroge beaucoup ces derniers temps sur ce en quoi consiste «crédibilité» et «maturité», depuis que le gouvernement du Québec a déclaré le 17 juin dernier, que les médias sociaux en manquaient (voir «Les médias sociaux et la communication du risque», mai 2008, Direction de la coordination de l’information et des mesures d’urgence). Cette décision a pour conséquences d’empêcher la collaboration entre le gouvernement et la population québécoise dans le domaine des préparatifs pandémiques, une sphère d’intervention où il est prouvé que l’engagement de l’infrastructure civile a un effet bénéfique sur la résilience d’une société.

Le document «Les pandémies et la sécurité humaine», mai 2006, du Programme de recherche et d’information dans le domaine de la sécurité humaine, Affaires étrangères Canada, conclut: «Il reste qu'une politique efficace en santé publique passe par le capital social. […] Dans leur volonté de réduire au minimum la panique, il faut que les gouvernements prennent garde de ne pas minimiser indûment le risque.»

La définition dans le dictionnaire du mot «crédible» consiste en «qui peut être cru, qui est vraisemblable». Croyable, fiable, plausible, vraisemblable, sûr, digne de confiance, qui représente un certain degré de fiabilité. Fiabilité signifie «probabilité de bon fonctionnement d’un dispositif». Fiabilité et démocratie vont-ils de pair? Peut-on se «fier» sur une population? Est-ce que le fait d’être «crédible» s’applique à une population, ou à une partie de population qui utilise les médias sociaux pour s'exprimer?

D’autre part, le concept de crédibilité peut ou non s’appliquer à une administration d’État. Prenons par exemple un régime autoritaire. De l’extérieur, ce régime apparaît louche, et il perd de la crédibilité par son manque de flexibilité. Il arrive que des nations se vantent que leur dirigeant est élu à 98% d’unanimité par la population. Mais autant d’unanimité est-elle possible? Si autant de gens votent pour le même individu, peut-être qu’ils ont peur de voter pour quelqu’un d’autre, peut-être qu’ils ne sont pas tout à fait libres d’exercer leur devoir de citoyen.

Alors il semblerait qu’un peu de négatif confère à une communauté un certain équilibre, une certaine «crédibilité». Un excès de fermeté et d’unanimité conduirait à un manque de liberté. La démocratie, pour exister, a besoin de critiques et d’opposition. Sinon, on n’appelle plus cela de la démocratie.

Il est dommage de constater que les autorités gouvernementales québécoises n’acceptent pas les assises de la démocratie dans le regard qu’elles posent actuellement sur les médias sociaux. Il semblerait que les autorités gouvernementales québécoises en soient encore à l’ère du «Full Control Message». Elles semblent incapables de se prêter au jeu démocratique de l’ère du «Full Conversation» dans les médias sociaux, dont a parlé Denis Paul van Chestein.

Je me demande ce qu’il faudrait faire pour renverser la vapeur, pour convaincre notre gouvernement de se déraidir un peu et de faire confiance au coureur, c'est-à-dire à la population québécoise. Si c’est plus de crédibilité qui est attendue des médias sociaux, cet objectif visé va-t-il à l’encontre de la nature même des médias sociaux? Et si c’était l’inverse dont nous aurions besoin, c’est-à-dire moins d’autorité et plus de liberté? Plus de leadership?

La première personne à occuper un poste de ministre aux États-Unis qui édite depuis plus d’un an son propre blogue, le ministre de la santé Mike Leavitt, a déclaré le 29 juillet dernier, en conclusion d’un discours prononcé lors d’une conférence portant sur la blogosphère de la santé: «J’identifie trois façons de composer avec le changement [c'est-à-dire, les blogues et les médias sociaux]: 1) aller avec la vague, suivre le pas des nouveautés; 2) accepter les nouveautés et survivre; 3) se positionner comme un leader et prospérer. Nous sommes, ici, aux États-Unis d'Amérique. Continuons d'être un leader et de prospérer!». Au Québec, à ma connaissance de la géographie, nous sommes aussi situés sur le même continent que les États-Unis d’Amérique, c’est-à-dire en Amérique du nord. Mais le discours officiel est malheureusement tout autre.

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