Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

Quand les médias sociaux prennent le relais du travail de diffusion que devrait effectuer le gouvernement

Paru le mercredi, 20 août 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com

900 citoyens, sur une population totale de 32,852,849 habitants au Canada, cela donne 0,007% des ménages canadiens, d’après un savant calcul effectué par Le Devoir, qui sont présentement au courant des dangers des changements climatiques sur leur santé. Parce que ces gens ont demandé à recevoir par écrit une copie (papier) du volumineux rapport de Santé Canada sur les conséquences sanitaires du réchauffement climatique. Parce que l’administration Harper met des bâtons dans les roues de la diffusion de l’information. En effet, le gouvernement fédéral lancé le rapport préparé par une vingtaine de chercheurs, sans tambour ni trompette le 31 juillet dernier, et refuse depuis lors de mettre en ligne ce rapport sur le site Internet de Santé Canada.

Qu’à cela ne tienne, certains citoyens ont pris la décision de diffuser eux-mêmes le rapport, en utilisant la blogosphère comme support de diffusion. «Le gouvernement ne veut pas diffuser ce rapport d'intérêt public? Eh bien, nous allons le faire à sa place», a indiqué au Devoir Miguel Tremblay, un physicien à l'emploi d'Environnement Canada qui anime depuis quelques mois le blogue «Hors des lieux des communs» (ptaff.ca/blogue). La diffusion du rapport a ensuite été reprise par plusieurs forums de discussion du domaine de l’écologie. Les médias sociaux ont pris le relais de l'information.

Le journaliste Fabien Deglise du Devoir marque un bon point à propos des conséquences de cette prise en main: «La mise en ligne de ce rapport, si elle vient faciliter l'accès à ce document, fait également en sorte que cette analyse fédérale va désormais être indexée par les moteurs de recherche, de type Google ou Yahoo. Ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant en raison de la politique de diffusion restreinte imposée par Ottawa

L’administration Harper a annulé à la dernière minute, sans explication, une vaste campagne de promotion du rapport. Voilà donc un exemple concret de prise en charge par des communautés virtuelles, d’un travail de sensibilisation et d’information, pour compenser pour le travail qui aurait dû être a priori effectué par le gouvernement. Des citoyens font l’impossible pour tenter de contourner l’attitude de «Big Brother» de l’administration Harper, et les médias sociaux sont utilisés comme plate-forme de diffusion de l’information.

Par ailleurs, ce n’est pas le seul exemple de campagne de sensibilisation qui a présentement lieu dans les médias sociaux canadiens. La Presse canadienne et le Devoir ont rapporté le 18 août qu’un contre-pouvoir viral est en train de se constituer:
«Les adversaires des changements projetés par le gouvernement Harper à la Loi sur le droit d'auteur ont lancé une cybercampagne pour combattre le projet de loi controversé.

Tous les moyens sont bons -- Facebook, YouTube, Wikipédia, blogues personnels -- pour faire passer leur message. Ils veulent que le gouvernement abandonne son projet de loi C-61 ou y apporte d'importantes modifications quand le Parlement reprendra ses travaux, le mois prochain.

Le mouvement numérique est dirigé par Michael Geist, un professeur à l'Université d'Ottawa, spécialiste d'Internet et du commerce électronique. En plus de son propre blogue, M. Geist préside un groupe Facebook appelé Fair Copyright for Canada, qui compte 90 000 membres, dit-il. Selon lui, si les Canadiens se mobilisent, c'est parce qu'ils sont conscients de la façon dont les réformes proposées pourraient affecter leur quotidien. «Il ne s'agit pas uniquement du droit d'auteur. On parle de l'environnement numérique, insiste-t-il. Cette loi représente une réelle menace contre la vitalité de l'environnement en ligne.


Le mouvement de protestation a aussi débordé du cyberespace. Un expert-conseil de Calgary a organisé un rassemblement à l'endroit où a eu lieu un événement organisé par le ministre Prentice, le mois dernier. Des membres du mouvement en ligne s'efforcent aussi de transmettre leur message par des campagnes d'envoi de lettres à leurs députés et des rencontres avec ceux-ci.»
Un travail de sensibilisation et d’information de longue haleine a lieu depuis plus d’un an au sein de la communauté virtuelle Zonegrippeaviaire.com, concernant la menace d’une pandémie d’influenza et ses conséquences sur nos vies. Zonegrippeaviaire aurait souhaité que son rôle positif de renforcement de la mitigation de la société québécoise soit reconnu par le gouvernement du Québec. Ce qui n’a pas eu lieu, le gouvernement ayant plutôt décidé de ne pas reconnaître le Flublogia et Zonegrippeaviaire, «parce que nous ne voulons pas reconnaître les autres».

L’attitude du gouvernement du Québec par rapport à la diffusion des questions concernant la menace d’une éventuelle pandémie d’influenza, pourrait-elle se comparer à l’attitude adoptée par l’administration Harper concernant les dangers des changements climatiques sur la santé des canadiens?

Le fait que le gouvernement du Québec n’ait pas publié de communiqué de presse pour annoncer, le 11 août dernier, un investissement de 50 millions de dollars d’acquisition de divers antibiotiques pour soigner des infections secondaires lors d’une situation de pandémie, devrait être analysé. Est-ce une manière de minimiser l'impact de la diffusion de cette nouvelle? En choisissant de faire une entrevue, plutôt que de publier la nouvelle sur un fil de presse, le gouvernement s’assure-t-il que moins de médias ne diffusent la nouvelle? L’absence d’émission d’un communiqué de presse m’a été confirmée aujourd’hui au téléphone par M. Pierre Laflamme, du ministère de la Santé et des Services sociaux, celui-là même qui a réalisé l’entrevue auprès de Jean-François Cliche du quotidien Le Soleil. Par ailleurs, l’annonce du 50 millions d’investissement n’a pas non plus été intégrée depuis le 11 août dernier à Pandémie Québec, le site gouvernemental officiel, guichet unique, où sont censées être colligées toutes les informations concernant l’influenza aviaire et les préparatifs de pandémie du Québec. Les raisons motivant l'absence de cette nouvelle, à la fois sur le site du ministère de la Santé et des Services sociaux et sur le site Pandémie Québec, demeurent nébuleuses. Pour une fois que le gouvernement du Québec avait une excellente nouvelle à annoncer dans le domaine des préparatifs de pandémie, il est étrange que celle-ci n'ait pas été traitée avec davantage d'envergure. Bien entendu, le média social Zonegrippeaviaire a diffusé la nouvelle. La nouvelle a été traduite en Floride, aux États-Unis, par le média social FluTrackers.com, et elle a été traitée par un des meilleurs blogueurs américains du Flublogia, Michael Coston (Avian Flu Diary).

L’existence des médias sociaux et leurs activités contribuent donc à combler des zones grises dans la diffusion de l’information de diverses administrations gouvernementales au Canada. Si des citoyens, qui utilisent les médias sociaux comme outils de propagation de l’information, ne multipliaient pas leurs prodigieux efforts pour diffuser des nouvelles dans certains domaines que le gouvernement souhaiterait visiblement taire, il en résulterait un quasi total black-out d’information, où environ seulement 0,007% des gens risqueraient d’être informés de récents événements ou décisions, ou encore d’éléments potentiellement dangereux pour leur existence. Avec les médias sociaux, ce pourcentage pourrait grimper à près de 10%, avec un peu de chance, ou peut-être même davantage. Ce qui est mieux que rien du tout. L’idéal, bien entendu, serait que le style «Big Brother» de gestion de l’information soit complètement aboli au pays. Mais en attendant que cet heureux jour ne survienne, nous pouvons toujours compter sur le courage de certains citoyens et l’efficacité des médias sociaux.

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