Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

Le Québec a besoin d’un plan numérique, ainsi qu'un plan multisectoriel de planification de pandémie

Le Québec a besoin d’un plan numérique, ainsi qu'un plan multisectoriel de planification de pandémie et de reconnaissance du rôle des médias sociaux

Paru le dimanche, 2 novembre 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com



Ultra F., Digital Vision, libre de droits, #82245837

Il y a six jours, la bloggueuse montréalaise Patricia Tessier passait à l’action et signait une lettre ouverte adressée au premier ministre du Québec – intitulée Monsieur Charest – Le Québec a besoin d’un plan numérique - visant une gouvernance numérique, afin de «non seulement rattraper le retard, mais devenir une nation qui prendra sa place et se distinguera dans la nouvelle économie».

Une excellente initiative, qui a récolté en peu de jours de nombreux appuis, avec près de 200 personnes ayant rejoint le groupe associé à cette lettre sur Facebook, une quarantaine de bloggeurs ayant mis la main à la pâte de la diffusion de la lettre, et plusieurs mentions dans les médias.


Jean Charest. Photo Jacques Nadeau, Le Devoir. Source

Dans moins de 72 heures, il est probable que le premier ministre Jean Charest annoncera la tenue d’une élection générale provinciale au Québec. Je suis persuadée que Patricia Tessier et ses acolytes, dont plusieurs excellent en communications, arriveront à faire cheminer leur démarche au cours de la campagne électorale provinciale.

Patrice-Guy Martin, dans un article publié dans Direction informatique, qui se penche notamment sur la démarche de Patricia Tessier, indique qu’il faut prêcher par l’exemple: «Nous avons tous un environnement sur lequel nous avons un pouvoir d’influence ou d’action. C’est dans ce périmètre que nous sommes véritablement des agents de changement. Sachons utiliser ce pouvoir. Il est plus grand que nous le croyons. Il serait sage que nos gouvernements poussent dans ce sens. Il serait encore plus sage de commencer à agir sans nécessairement les attendre.»

Le pouvoir d’action, c’est justement ce sur quoi Zonegrippeaviaire.com s'appuie. Nous prenons notre rôle d’information et d’empowerment des citoyens en vue d’une pandémie très au sérieux. Étant donné que les préparatifs pandémiques sont l’affaire de tout le monde, et en particulier des gouvernements, nous sommes allés cogner à la porte du gouvernement du Québec au printemps dernier, et nous lui avons demandé de nous considérer comme un partenaire de développement de la planification de pandémie, et comme faisant partie de la solution d’approche à une pandémie. La réaction du gouvernement a été le déni des médias sociaux. Zonegrippeaviaire.com n'est pas à sa première lettre adressée au premier ministre Jean Charest (et je dois souligner que les réponses brillent par leur absence). Nous souhaitons, nous aussi – comme Patricia Tessier et ceux et celles qui l’appuient - non seulement que le gouvernement du Québec rattrape le retard, mais qu’il devienne une nation qui prendra sa place et se distinguera dans le domaine des préparatifs en vue d’une pandémie. Cela permettrait de limiter les dégâts à notre économie, et de diminuer le nombre de victimes qui seront emportées par un virus pandémique et les dommages collatéraux causés par une pandémie d'influenza.

Je considère qu’il est tragique que les autorités provinciales québécoises et fédérales canadiennes n’aient pas encore trouvé une formule de collaboration et n’arrivent pas à reconnaître le rôle du Web participatif (ou médias sociaux) comme levier de mitigation de la société. Pourtant, ce rôle est souligné dans le document «Les médias sociaux et la communication du risque», signé en mai dernier par la Direction de la coordination de l’information et des mesures d’urgence de Services Québec.

Le déclenchement des élections provinciales entraînera sans doute la paralysie du gouvernement jusqu’au printemps 2009 (le temps que la campagne électorale se déroule, puis qu’un nouveau cabinet ministériel soit formé, puis que ces personnes prennent la pleine possession de leurs dossiers). Pendant que les autres nations du monde continueront de développer leurs planification de pandémie, nous pouvons anticiper que le Québec prendra encore plus de retard dans ce domaine.


David Nabarro. Photo Getty Images source

Les élections provinciales tombent plutôt mal, à un moment clé où les agences onusiennes en sont arrivées à un important tournant de leur vision de la gestion de pandémie. Le Quatrième Rapport intérimaire mondial sur la gestion de la grippe aviaire (voir le synopsis en français) publié à la mi-octobre, avec David Nabarro, coordonnateur du système des Nations Unies pour la grippe, à la barre des travaux de ce rapport, propose de nouvelles directives internationales qui pousseront les décideurs et les planificateurs de pandémie des États du monde à retourner à leurs plans de pandémie et à les faire évoluer. Ce qui s’annonce, à l’échelle mondiale, est donc un changement majeur dans la gestion de pandémie: Au cours de l’année 2009, [les pays] veilleront à mettre au point des protocoles, des cadres d’action et des indicateurs en vue d’une préparation multisectorielle [sociale, économique et politique] à une pandémie, et l’on proposera des mécanismes en vue de son financement approprié.»


Mike Leavitt. Photo source

Naturellement, je souhaiterais que ces questions deviennent des enjeux électoraux, mais je suis réaliste et je sais que cela n’arrivera probablement que dans mes rêves les plus fous, en raison de l'apathie des médias et de la société en général envers ces questions. Le sujet d'une pandémie ne cadre pas très bien dans une campagne électorale car cela n'a pas le potentiel de générer des masses de votes. Comme l'a mentionné le ministre américain de la Santé, Mike Leavitt, la semaine dernière lors d'un séminaire diffusé sur Internet: «Il n'est pas facile de parler d'une pandémie». Toutefois, son administration s'est positionnée en leader et soutient l'importance des préparatifs individuels. «Nous devons continuer à utiliser chaque occasion pour parler de l'état de préparation individuel. Oui, le gouvernement doit jouer un rôle, que ce soit au fédéral ou local… mais les gens ont une responsabilité et c'est en joignant leurs actions que cela déterminera finalement si nous sommes préparés ou pas.» Il est à souhaiter que le gouvernement du Québec adopte lui aussi un discours d'encouragement des préparatifs individuels, et en vienne à reconnaître et soutenir la communauté virtuelle Zonegrippeaviaire.

Suivons de près le momentum créé par les démarches visant une gouvernance numérique. Qui sait, peut-être surviendra-t-il des occasions de faire valoir la nécessité d’une préparation multisectorielle en vue d’une pandémie et le rôle des médias sociaux au cours de la campagne électorale provinciale qui s’annonce.

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