La rentrée scolaire a eu lieu au début du mois. J’ai remarqué que plusieurs feuilles d’arbres commencent à rougir. Le changement de saison s’en vient. L’arrivée de l’automne signifie habituellement une augmentation des cas de grippe aviaire un peu partout dans les zones à risque.
Alors que les cycles de l’influenza poursuivent leur inexorable danse, et que les scientifiques analysent les données séquentielles, les choses évoluent lentement dans l’état mondial des préparatifs pandémiques.
Le changement le plus saisissant survenu cette année a été un glissement graduel vers une absence de nouvelles, conduisant à un black-out d’information. En apparence, nous avons l’impression qu’il ne se passe rien, puisque nous n’entendons pas parler de grand-chose, mais les plus avisés savent que cela pourrait être trompeur…
Depuis décembre 2007, nous avons pu assister à une escalade d’événements qui ont conduit à un black-out de nouvelles. Un groupe de cas humains de grippe aviaire survenus au Pakistan, a été rendu public plusieurs semaines après qu’il soit survenu. Ce fut le fouillis dans la gestion des échantillons, ce qui a eu pour heureuse conclusion d’éviter de conclure à une transmission interhumaine. Des préoccupations ont alors été soulevées sur l’efficacité du système de surveillance mondial des épidémies.
Un autre changement notable survenu cette année, a été la force et la vivacité des foyers d’infection. Des pays, qui jusqu’alors avaient réussi à contenir les foyers d’infection de grippe aviaire, ont dû combattre de façon beaucoup plus féroce le virus, qui a frappé même lorsque la température s’est avérée plus clémente. Des oiseaux jusqu’alors asymptomatiques, comme les canards, ont succombé en masse au virus de la grippe aviaire, notamment au Vietnam.
Une flambée importante de grippe aviaire a eu lieu au Bangladesh et en Inde. Des centaines de gens ont consommé des oiseaux tombés raides morts, probablement en raison du H5N1, mais les autorités ont affirmé qu’aucun cas humain de grippe aviaire n’était survenu sur leur territoire. Quelques mois plus tard, des analyses de routine ont révélé un échantillon humain positif au H5N1. Un cas d’infection au Bangladesh a alors été annoncé (il s’agissait d’un enfant). D’autres préoccupations concernant l’efficacité du système de surveillance des épidémies ont alors été soulevées.
La Corée du Sud a elle aussi combattu une vive flambée de grippe aviaire. Un soldat infecté au H5 (confirmé en laboratoire) s’est avéré ne plus être infecté par la suite. Un fouillis semblable à celui survenu au Pakistan est survenu, laissant planer encore plus de préoccupations à propos de la fiabilité des déclarations officielles et du système de surveillance des épidémies.
Le clou de l’année a été la sortie flamboyante de la ministre indonésienne de la santé, Siti Fadilah Supari. Elle nous en a fait entendre de toutes les couleurs, et nous n’en avons pas encore fini avec son histoire hautement controversée de partage des souches.
Au fil des mois, l’impasse diplomatique entre l’Indonésie et le monde entier s’est aggravée, et malgré une visite à Jakarta du ministre américain de la santé, Mike Leavitt, et même du président de Microsoft, Bill Gates, les pourparlers concernant le partage des souches de virus sont demeurés au beau fixe. À l’approche de la prochaine réunion de l’Organisation mondiale de la santé à ce sujet, prévue à Genève en novembre prochain, les mêmes histoires publiées depuis novembre dernier nous sont revenues dernièrement. Mais aucun nouvel élément n’a encore été rapporté par les médias. L’Indonésie a annoncé il y a quelques mois sa nouvelle politique de black-out d’information et a cessé de rapporter les cas humains de grippe aviaire, alors que cela fait deux ans que les infections qui se produisent chez les oiseaux ne sont pas non plus rapportées à l’OIE. On ne comprend pas trop où se situe l’OMS dans tout cela et c'est le silence «de mort» du côté des bulletins de mise à jour de la situation indonésienne. Il y a quelques semaines, une équipe de l’OMS a été déployée sur le terrain en Indonésie, et l’on soupçonne que la grippe aviaire soit mal diagnostiquée comme étant de la fièvre dengue. Il est difficile de savoir ce qui se passe réellement.
Les pays développés (sauf le Canada, bien entendu…) ont démontré une activité accrue dans leur planification. Le Royaume-Uni a commencé par déclarer que l’armée ne pourrait venir en aide à l’infrastructure civile en temps de pandémie. Ensuite, les Britanniques ont révélé qu’une pandémie constituait la menace Numéro 1 de leur nation. Un représentant de l’Union européenne a effectué ensuite une déclaration semblable. Cette semaine, 27 ministres de la santé de l’Union européenne se sont réunis à Angers en France, avec la grippe aviaire à l’ordre du jour de leur rencontre. Un des objectifs visés est de niveler les préparatifs pandémiques des pays de l’UE, une sage stratégie: les pays de l’UE ont compris qu’ils seront aussi forts que leur maillon le plus faible en temps de pandémie. La proximité des pays situés sur le continent européen force les États membres de l’UE à resserrer leur collaboration, s’ils souhaitent s’en tirer avec le moins de dommages possibles. Le ministre américain de la santé, Mike Leavitt, a même été invité à cette rencontre des 27 (je suppose pour parler de stratégie mondiale et faire le point sur la situation de la menace pandémique).
Le Japon, lui aussi, s’est démarqué ces derniers temps, par la multitude d’annonces publiées à propos de ses préparatifs de pandémie. Une annonce n’attend pas l’autre… Les Japonais ont décidé d’inoculer une partie de leur population avec un vaccin pré-pandémique. Les premiers répondants ont été ciblés en premier. La réserve de Tamiflu a été doublée. Un don de 500,000 doses de Tamiflu a été effectué aux pays de l’Asie de l’Est. 40,000 vêtements de protection ont été achetés par le gouvernement du Japon, de même que des lits spéciaux ressemblant à des incubateurs pour traiter les enfants atteints de la grippe aviaire. 3,600 respirateurs ont été commandés. Le Japon a également planifié une simulation de pandémie avec la Chine et la Corée du Sud, qui devrait avoir lieu cet automne.
Pour le moment, nous ne concevons pas encore la magnitude des changements résultant de la situation mondiale. Nous pouvons réaliser que nous devrions être en train de faire quelque chose de différent pour composer avec l’évolution de la situation, mais nous ne savons pas encore quoi exactement! Nous pouvons nous appuyer sur des forces de la sphère du Flublogia pour poursuivre notre analyse, au fur et à mesure que des événements se produiront au cours de la prochaine saison:
- La collaboration de masse accélère notre compréhension de la situation mondiale;Alors que la sphère du Flublogia poursuit l’exploration de ses possibilités, les leaders scientifiques et politiques mondiaux semblent entrer dans une période où les risques sont ré-évalués et les enjeux se font moins précis, cachés sous une épaisse couverture de silence et de mystère.
- Les échanges et les conversations génèrent de la créativité et de l’innovation, ce qui fait émerger un système underground de surveillance mondial des épidémies;
- Les applications Web 2.0, tels les blogues et médias sociaux, permettent de catalyser l'interaction humaine;
- L'interaction humaine accélère l’apprentissage, la connaissance et la distribution de l’information;
- L'impact des efforts déployés aujourd'hui n’est qu’une onde à comparer aux masses de changements qui se pointent à l'horizon;
- Les conclusions d’aujourd’hui ne constituent pas pour autant les réponses de demain, et les États du monde font ainsi face au défi considérable d’un constant réajustement de leurs mesures.
C’est dans ce contexte que nous verrons s’il émergera ou non un nouveau système de surveillance des épidémies et comment les États du monde arriveront à assurer un certain mécanisme d’alerte précoce du déclenchement d’une pandémie.
Pour le moment, il n’est question que de possibilités d'un nouveau système. À la vitesse où évoluent les choses, rien n’indique que la rencontre de novembre sur le partage des souches donnera naissance à un tel nouveau système.
C’est pourquoi l’armée de citoyens qui composent la sphère du Flublogia déploie jour après jour des montagnes d’ingéniosité pour que puissent émerger des possibilités, en l’absence d’une certitude que le système officiel accomplira sa tâche.
Des gens, comme par exemple Laurence Brillant, de Google.org, réfléchissent à de nouvelles possibilités et élaborent des projets. D’autres, travaillent dans l’ombre à l’amélioration des possibles en construisant sur les anciennes bases, que ce soit probablement dans les corps diplomatiques, au siège de l’OMS à Genève, de même dans les cabinets ministériels de tout État qui se respecte.
Dieu seul sait ce que l’automne nous réservera comme surprises! Ce sera une saison haute en couleurs, pleine de sous-entendus, où il faudra redoubler d’ardeur pour arriver à déterrer les informations et tenter d’y voir clair.
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