Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

Crise de listériose | «Calveat emptor»: débrouillez-vous pour savoir quoi acheter et quoi consommer

Crise de listériose | «Calveat emptor»: débrouillez-vous pour savoir quoi acheter et quoi consommer. Demandez-vous aussi à quel point vos vies comptent aux yeux du gouvernement et des industriels

Paru le mardi, 2 septembre 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com


Tom Hanks, dans le film Seul au monde. Photo source

On voit souvent, dans les billets de blogueurs sur l’influenza, l’expression «Calveat lector», en lien avec des données de cas suspects de grippe aviaire survenant un peu partout en Asie.

Je viens de lire un article du Devoir, plutôt bouleversant, «Mourir de la listériose: les dessous d’une crise fabriquée au Canada», qui mentionne l’expression «Calveat emptor». Il paraîtrait que c'est au citoyen de se débrouiller pour acheter et consommer les bons produits. Nous sommes livrés à nous-mêmes, tel un Tom Hanks dans le film Seul au monde. Voici la conclusion de l'article du Devoir:
«Des esprits cyniques concluront qu'il n'est point besoin d'enquête ni de réforme. Le marché fonctionne très bien: les commerces qui négligent la qualité des aliments sont vite évincés du marché par des consommateurs furieux ou craintifs. Le public renouerait ainsi avec l'antique maxime Caveat emptor! À l'acheteur d'être prudent.

Toutefois, ce serait là sacrifier les gens, de plus en plus nombreux, qui n'ont pas les moyens de faire montre de circonspection, ou même de choisir leurs aliments. Les malades dans les hôpitaux, les résidents des hospices, les enfants des écoles, nombre de gens vulnérables ou dépendants comptent parmi la clientèle de l'alimentation commerciale.

Qui va les protéger du laxisme d'une entreprise ou de la complaisance d'un gouvernement? Achetez local, clament certains. En matière de bactérie dangereuse, le «produit local» n'est pas plus sécuritaire que le produit industriel. En cas de contamination, ses ravages seront forcément limités. Mais cela ne saurait tenir lieu de politique de santé publique.

D'où viendra l'avis honnête dont le citoyen a besoin si le gouvernement, l'université et toute une presse n'en ont que pour les industriels de l'alimentation?»


Jean-Claude Leclerc

Je vous invite à lire au complet et attentivement l'article de Jean-Claude Leclerc du Devoir. L'auteur a dû effectuer de nombreuses recherches sur les dessous de la crise de listériose pour en arriver à produire un article de ce calibre.


Jean-Claude Leclerc révèle qu’il existe une sorte de système à deux vitesses de production des aliments au Canada: la production d’aliments de qualité mieux contrôlée, destinée à l’exportation pour le marché américain, et une production d’aliments de qualité beaucoup moins contrôlée, qui sont vendus aux Canadiens. Le journaliste souligne également le fait que le gouvernement, les universitaires et les médias ferment les yeux sur cette réalité, puisqu’ils appuient les grands industriels du secteur de l’agro-alimentaire.

OK, laissez-moi reprendre mon souffle quelques instants, parce que ces révélations sont plutôt dérangeantes!

Ai-je bien compris? Il semblerait qu’IL N'EXISTE PAS présentement d’instances DANS TOUT CE GRAND PAYS qui souhaiteraient améliorer la sûreté des aliments destinés au marché canadien.

Au fond, c’est un peu la même situation pour la grippe aviaire et les préparatifs pandémiques. Les autorités semblent se ficher éperdument de savoir ou pas si nos préparatifs canadiens en vue d’une pandémie sont suffisants ou insuffisants. La menace de pandémie est No. 1 dans l’échelle des risques pour la nation (du moins, c'est l'avis du Royaume-Uni). Mais avez-vous connaissance présentement que des décideurs et des planificateurs se tracassent à ce sujet? Pas du tout! Pas plus que pour la sûreté alimentaire au Canada.

En fin de compte, ce sera encore les citoyens qui devront tout encaisser. Ceux et celles qui auront la chance de tomber sur de l’information d’ici le déclenchement de la pandémie, et qui auront pu se préparer le mieux possible, vont peut-être échapper à un destin tragique.

Mais pour les autres, c’est «Calveat emptor».

D'après ce qui se passe actuellement - ou plutôt ce qui ne se passe pas - il serait sage de faire de la «Bouée de sauvetage en cas de pandémie» notre lecture de chevet assidue, et tirer tous les plans possibles pour nous préparer individuellement du mieux que nous le pourrons, en vue du déclenchement de la prochaine pandémie d’influenza. Ne lésinons surtout pas sur la prudence et la prévoyance, car si nous nous comparons à d’autres pays qui se préparent à cet éventualité, alors que ce n’est pas notre cas, j'envisage que la pandémie ne sera pas du gâteau pour nous, citoyens canadiens. À observer la gestion de la présente crise de listériose au Canada, il n’est pas difficile de faire le parallèle avec la crise que provoquera la déclaration d’une pandémie. Et avec ce que nous découvrons grâce à ce qui émerge face aux décisions gouvernementales, dans un contexte encore plus grave nous risquons de nous sentir aussi seuls que Tom Hanks. Et j’ai malheureusement l’impression que ce n’est pas demain que nous verrons les choses s’améliorer…

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