Blogue de Lyne Robichaud

18 novembre 2008

Nous sommes confrontés à un dilemme moral et les stratégies du passé ne suffisent plus

Paru le samedi, 18 mai 2008, dans la Gazette de Zonegrippeaviaire.com



Cette semaine, la voix du virtuose de l’influenza à l’OMS, Keiji Fukuda, s’est élevée pour parler d’un projet de nouveau paradigme de recherche en santé publique, ce qui relève davantage de l’éthique que de la science.

Par ailleurs, d’autres révélations ont démontré que des changements semblaient être souhaités, vers un nouveau paradigme en ce qui a trait à la confirmation des cas humains, ce qui relève davantage de l’éthique que de la politique. Une rencontre, prévue le 17 mai, devait statuer sur un (ou plusieurs) cas humain(s) de H5N1 en Corée du Sud.

Il est intéressant d’observer que l’éthique de la grippe aviaire commence – heureusement et avec raison – à avoir le dessus sur certains comportements, qui jusqu’à présent ont été guidés par des intérêts personnels et autres, mais jamais en tous les cas dans l’intérêt de la santé publique mondiale. Le consumérisme et l’enrichissement général ont généré des individus centrés sur eux-mêmes et faiblement concernés par le monde. Or, le monde est sous la menace de l’effondrement. Nous sommes confrontés à un dilemme moral, et les stratégies du passé ne suffisent plus.

L’urgence de la situation (une menace de pandémie) fait en sorte que les anciens comportements ne sont plus acceptables. En effet, nous commençons à nous demander ce qui restera de notre humanisme, si demain, par malchance, devait éclater une pandémie qui nous précipiterait dans une terrible austérité, que nous ne sommes absolument pas préparés à encaisser, et qui risquerait d’imposer la mise sous tutelle de régions entières de l’humanité, l’asservissement de leurs populations. Nous sommes revenus au mot d’ordre d’une ancienne époque, «assurer le salut du genre humain», mais ce n’est plus à coup de multiplication de bébés que nous y arriverons cette fois-ci. Des valeurs universelles s’imposent désormais comme étant le nouveau genre de ce qui a été qualifié par Keiji Fukuda comme étant une Renaissance scientifique: partage, échange, solidarité, amour de son prochain, protection de la vie.

Il a été demandé poliment aux scientifiques de partager leurs données séquentielles. Keiji Fukuda a déclaré: «Ce que nous espérons améliorer est une sorte de partage et flux d'information, et l'amener à un autre niveau».

Le secteur des communications des questions de pandémie et des stratégies gouvernementales semble être également lui aussi arrivé à un point de non retour. Sur la base de la logique, le nouveau paradigme de «partage et flux d’information» devrait s’appliquer également aux communications et aux stratégies gouvernementales. D’ailleurs, l’OMS a indiqué le 30 avril dernier qu’un nouveau rôle des communications serait défini prochainement.

La menace d’une pandémie est une lame qui aiguise notre courage. La perspective de ce qui pourrait nous écraser pourrait aussi contribuer à nous réveiller. Opérer selon les vieilles règles pourrait désormais être considéré comme étant non professionnel et immoral. Espérons que la tentation du retrait, qui pourrait être très élevée chez des planificateurs et des décideurs, ne remportera pas la manche au détriment de la santé publique. Même si certains pourraient penser être passés maîtres dans l’art d’esquiver la catastrophe en se faufilant loin de leur lourde responsabilité de protéger les populations, et en se soustrayant ainsi aux angoisses de l’action, ils courront à leur propre catastrophe lorsque se pointera la pandémie. Car ne sommes-nous pas tous dans la même galère? En travaillant pour renforcer l’autonomie d’une société, se renforce par le fait même la mitigation de chaque individu.

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